Kaliuccia nous demande de raconter notre premier entretien d’embauche. Sujet passionnant ! En fait, si je réfléchis bien, je ne retrouve dans ma carrière que deux vrais entretiens d’embauche. Le premier pour trois mois de boulot d’été quand j’étais étudiant, l’autre pour ce qui allait être ma seule expérience professionnelle en « fixe » dans une boîte, avant de devenir intermittent du spectacle…

Depuis, je m’aperçois que ma chance est que l’on m’appelle pour me faire bosser, je démarche très peu, et souvent indirectement.

Étudiant dans une école de cinéma, lorsque les beaux jours furent venus, certaines pressions parentales s’exerçaient pour que je me trouve un job d’été ! Faut-il avouer que je n’en avais pas très envie ? J’envoyais donc un seul CV et lettre de démotivation à la Fnac. Le seul but étant de justifier d’avoir fait des démarches, mais que malheureusement… 

Je n’allais pas prendre le risque d’en envoyer cent, dans le lot il y aurait forcément quelqu’un que j’aurais pu intéresser !

Ma stratégie n’était pas au point, puisque l’on me proposa un rendez-vous la semaine suivante, un matin à 9 h pétante, dans un immeuble parisien. Bon, soit, me dis-je, allons-y… 

C’est ainsi, qu’à ma grande surprise, je me retrouvais dans une sorte de salle d’examen, avec une cinquantaine de condisciples et qu’après un petit discours d’introduction l’ont nous distribua une petite brochure remplie de questions du style : avez vous peur des araignées ? Êtes-vous toujours souriant ? Faites-vous des cauchemars ? Et j’en passe… 

Allez savoir pourquoi, je sentis le piège dès la troisième question et me décidais donc à donner une orientation, un personnage à mes réponses, en gros je suis quelqu’un d’inintéressant, non je n’ai pas peur des petites bêtes, oui je suis gentil, bref, d’une affligeante banalité. Bien m’en pris, parce qu’arrivé à la vingtième question, je m’aperçus qu’elle m’avait déjà été posée, mais reformulé autrement (genre : les araignées vous font elles peur !), et qu’évidemment pas question de retourner voir ce que l’on avait répondu ! Avec mon personnage, je pouvais suivre la même ligne…

Ah oui, je vous ai dit que j’ai toujours eu horreur de ce genre de test psychologique où des gens se targuent de dresser votre portrait ? Dès que je m’en aperçois, il faut que j’essaye de les prendre à leurs propres jeux… 

La grande question, le détecte-t-il ? Ou bien m’ont-ils pris pour ce que je voulais qu’ils me prennent ?

S’ensuivis, une petite réunion de présentation de l’entreprise, sa philosophie et que c’est la meilleure du monde, et pourquoi nous devrons, pour ceux qui seront choisis, d’êtres fiers de travailler pour cette belle enseigne au service de ces clients, etc, etc…

Enfin, un entretien individuel avec un type dont je garde un souvenir sympathique. J’étais d’autant plus cool que j’étais persuadé d’avoir raté le test psycho ! Un mec aussi banal que moi ne pouvais pas les intéresser ! (je sais j’aurais pu jouer carrément au con et dire que j’avais peur de tout, que je ne souriais jamais, etc… mais mon ego à horreur de cela !)

Donc nous voila à causer étude, ma passion pour le cinéma et la photo, il me pose quelque question technique, me demande ce que je préconiserais comme appareil reflex (à l’époque c’était reflex ou Instamatic, pas grand-chose entre les deux !) pour ses photos de vacances, lui qui n’est pas plus amateur que cela, il me demande ce que je vois comme différence entre les concurrents qu’était alors Canon, Nikon, Olympus, Minolta ou Ricoh… Bref je me prends au jeu, il m’asticote, et je défends, j’argumente et… ben les vingt minutes sont passées ; il me lâche l’ineffable et fatale : On vous écrira… 

Et voilà comment en sortant j’ai commencé à planifier mes vacances…

Las, je n’aurais pas dû… 

Une semaine après je trouvais un courrier m’invitant à me présenter à Mme RH de la Fnac des halles, le plus rapidement possible afin d’établir les papiers inhérents à mon embauche, car je commençais le 1er juillet et finissais le 30 septembre (heureusement mes cours reprenaient fin octobre !) pour un salaire intéressant à l’époque, autour de 7000 fr. Je m’y rendais donc, avec pour la première fois une certaine angoisse. Mme RH, avait la quarantaine, peu avenante, l’air très pressé. Sortie de l’état civil ordinaire, elle sembla fort contrariée devant ma tête quand elle me demanda mon numéro de sécu. Genre, ha ben je ne sais même pas ce que c’est ni où on l’achète… Je finis par dire que je n’en avais pas. Elle me regarda et me lança d’un air dédaigneux la sentence : donc c’est la première fois que vous travaillez (sous entendus un grand garçon comme vous vous êtes un sacré branleur et qui c’est qui va se taper la paperasserie pour vous inscrire c’est bibi et y font chier a embauché des gens qui n’ont jamais bossé parce que je n’aurais jamais finis a 18 h d’ailleurs comme le dis Simone qu’est la cheffe des caissières…)

Ce fut un boulot sympa et qui m’a bien plus, de belles rencontres et quelque angoisse, comme de suivre en quasi direct au Téléphone l’attentat contre le Tati du Boulevard Montparnasse situé juste en face de la FNAC. 

Alors que j’appelais pour connaître l’état des disponibilités, il me fut répondu que désolé, mais que l’on évacuait le magasin pour cause de bombe ayant éclaté ! Angoisse partout chez nous ! Les téléphones portables n’existaient pas encore, pas de tweet ni de Facebook…

Fin septembre, la moitié de mon salaire était repartie dans du matériel photo acheté chez… mon employeur…

Et voilà comment je suis rentré dans la vie professionnelle, première expérience qui me valut d’être particulièrement blanc face au bronzage de mes copains, et d’écoper dès novembre d’un manque criant de vitamine D ! Aux Halles, ce n’est pas le soleil qui est le plus visible !

Je vais faire un deuxième billet pour l’autre entretien, parce que celui-ci il n’était pas banal !

Et vous, si vous nous racontiez sur votre blogue, votre premier entretien d’embauche ?