Ceci est ma participation au petit jeu du sablier d'Automne...
le vieux...
vendredi, 5 octobre 2007. Lien permanent Des mots...
Je n'ai plus l'habitude de travailler en entendant des sons humains autour de moi. Ce n'est pas ma faute si mon dernier patron était muet. Cela ne l'empêchait pas d'être un gars bien, jamais un mauvais coup, un énervement, tout en douceur. Il savait toujours trouver le geste qu'il fallait pour me mettre dans le bon rythme de travail, m'expliquer exactement ce que je devais faire. Une caresse, un regard, et j'avais compris. Tout ce passait naturellement entre nous. C'est vrai que mon boulot, je le connaissais par cœur. J'ai été élevé à la dure, et dés que j'ai été en âge de trimer, on m'a mis d'office aux champs. Cela n'a pas toujours été facile, le boulot était pénible et mes patrons pas toujours tendres avec moi. J'en ai eu deux avant le vieux muet. Le premier, il n’arrêtait pas de crier après moi, comme quoi je faisais tout de travers, régulièrement il me battait avec une trique. Pour me faire avancer qu'il disait. J'en ai encore mal quand j'y repense… Le deuxième, ni bon ni méchant, lui aussi a voulu me dresser, mais c'était juste des cris, toute la journée et quand il me tapait dessus, c'était seulement avec les mains. Puis finalement, le vieux est arrivé, il m'a pris avec lui, car on venait de me remplacer par une machine. Une machine, cela ne cause pas, ne proteste pas, juste elle tombe en panne. Et le vieux il n'avait pas les moyens de se payer une machine, il finirait sa vie à l'ancienne, comme ses parents lui avaient appris, et comme j'étais un des derniers à connaître le boulot… C'est là que j’ai su que l'on pouvait travailler en silence et dans le calme. C'est vrai aussi que le vieux ne courrait pas après le profit, tout ce qu'il voulait, c'est juste de quoi pouvoir nous nourrir, tout les deux. Le vieux, je peux dire que je l'ai aimé. Alors tout à l'heure, quand il est tombé, j’ai su que c'était fini, pour lui, mais pour moi aussi. Plus jamais je ne pourrais travailler avec des bruits humains autour de moi, trop de mauvais souvenirs. Et puis, dans nos campagnes, tous les percherons ont disparu, remplacés par les tracteurs, je suis le dernier…
Ceci est ma participation au petit jeu du sablier d'Automne...
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9 réactions
1 De Otir - 06/10/2007, 00:49
J'ai vraiment aimé cette histoire. Il m'a émue, ton cheval.
2 De dragon d'eau - 06/10/2007, 00:51
et merde, peux pas lire ce genre de trucs sans avoir envie de pleurer comme une gosse...
3 De Jathénaïs - 06/10/2007, 00:56
Quelqu'un veut un mouchoir ?
4 De souricette - 06/10/2007, 01:04
Dommage...... j'avais vu la photo avant de lire
Très beau texte, j'aime beaucoup
5 De Gilsoub - 06/10/2007, 01:51
->Otir: C'est que c'est émouvant, ces bestioles. Et au moment où l'on parle de les réintroduire pour les travaux forestiers. Peut êtres encore une race de sauvé
->Dragon d'eau: Y'a pas de honte, c'est bon de retomber en enfance de temps en temps
->Souricette: Essaie de faire les choses dans l'ordre la prochaine fois
6 De Jathénaïs - 06/10/2007, 02:08
gilsoub> ici, et pas seulement d'ailleurs, des Bourbonnais sont encore en activité (ben oui, on est pas dans le perche, non plus...) pour le débardage dans la montagne du même nom. Parce que les camions et autres engins ne vont pas partout, l'ONF fait régulièrement appel à ces charmants équidés, qui font la joie de quelques gamins en carriole.
7 De Jathénaïs - 06/10/2007, 02:09
pardon, j'ai pas fini ma phrase : qui font la joie... aux heures creuses des bûcherons.
8 De Gilsoub - 06/10/2007, 12:15
->Jath: Je sait, c'est pour cela que je disait qu'il commençait à êtres réintroduit. Les chevaux de trait son de nouveau de plus en plus utilisés et ces une bonne chose
9 De Jathénaïs - 06/10/2007, 12:25
euh, vi, mais en fait, ce que j'explique mal, parce que je dormais déjà, et dors encore, c'est que les chevaux de débardages n'ont jamais cessé d'être en activité ici. Pour le labour, moins, là, d'accord, mais pour le débardage et les mariages, ils ont toujours été de la partie.